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Les marques de passage Si les marques « de tâcherons » sont fréquentes, tout particulièrement sur les édifices de l'époque romane, mais ne peuvent être rattachées avec certitude aux Compagnons tailleurs de pierre, il n'en va pas de même pour les marques dites « de passage ». Il s'agit là des marques où apparaissent le nom et/ou le surnom du Compagnon tailleur de pierre ainsi que divers emblèmes, le plus souvent des outils de sa profession et des instruments de géométrie tout particulièrement le compas et l'équerre. Ces marques sont généralement datées. Les plus anciennes actuellement répertoriées remontent aux premières décennies du XVIIe siècle, mais il n'est pas à exclure que des monuments du XVIe en récèlent également. Le XVIIIe siècle et le début du XIXe voient leur prolifération, tandis qu'elles deviennent rares et discrètes au cours du XXe. Marque de passage de Compagnon tailleur de pierre, datée de 1648, sur la paroi intérieure de la célèbre « vis » de Saint-Gilles-du-Gard . La plupart de ces marques de passages se concentrent sur quelques monuments : la célèbre « vis » de l'abbatiale de Saint-Gilles-du-Gard, les vestiges du Temple de Diane à Nîmes (dans les jardins de la Fontaine) et le non moins célèbre Pont du Gard. Sur ces deux derniers monuments, elles voisinent avec celles laissées par des Compagnons de divers métiers, du XVIIe siècle jusqu'au début du XXe, et même, plus rarement, jusqu'à nos jours. L'intérêt de ces marques pour l'historien est considérable. Elles permettent tout d'abord d'attester de l'existence et de la permanence des compagnonnages dans telle ou telle région et à telle ou telle époque. Elles permettent également de recenser les surnoms portés par les Compagnons et de mieux connaître la géographie de leur recrutement quelquefois, il est d'ailleurs possible de suivre ainsi une partie de leur trajet. Enfin, elles permettent de mieux connaître l'évolution de leur emblématique et, de ce fait, de cerner peu à peu la difficile question de leurs origines lointaines et de leur vocation primitive. Philibert Delorme et les Compagnons tailleurs de pierre Le fait que ces marques se multiplient soudainement dans la première moitié du XVIIe siècle est probablement à mettre en relation avec la plus large diffusion que connaît alors, par des rééditions, l'uvre de Philibert Delorme, L'Architecture. Celui-ci prêche aux architectes et tailleurs de pierre une connaissance directe des chefs-d'uvre de l'Antiquité. La vis de Saint-Gilles y occupe une place importante, à cause de la perfection de sa stéréotomie (la géométrie descriptive appliquée à la coupe des pierres). Fils d'un maître-maçon lyonnais et lui-même formé sur le chantier, Philibert Delorme emploie largement dans certaines parties de son uvre une emblématique fondée sur la géométrie et les outils du maçon/tailleur de pierre, dont ne sont pas absentes des dimensions plus hermétiques. Ces mêmes emblèmes se rencontrent jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, et même au-delà, dans les « blasons » des Compagnons tailleurs de pierre. Bandeau emblématique illustrant les têtes de chapitre de L'Architecture de Philibert Delorme.
L'inventaire rigoureux et exhaustif des marques de passage des Compagnons tailleurs de pierre (et des autres métiers) reste à faire. Si vous connaissez de sembables marques en d'autres lieux que la vis de Saint-Gilles, le Pont du Gard et le Temple de Diane à Nîmes, merci de me les signaler. |